Naturalia, Bio c’ Bon, La Vie Claire, Biomonde, Biocoop… pour ne citer que des réseaux nationaux, les magasins bio déferlent dans les rues depuis quelques années, se livrant parfois à une concurrence à mort, surtout dans les villes cossues, de Paris intramuros aux lisières de l’Ile-de-France.
A Puteaux, par exemple, Biomonde, Naturalia, Bio c’ Bon et Au Centenaire diététique se partagent le centre-ville, aux côtés des rayons bio des supérettes. Pionnière en ville, en place depuis 25 ans, la gérante d’Au centenaire diététique table sur le conseil et l’aura de la boutique qui avait déjà trente ans d’ancienneté lors de son arrivée. «J’ai de l’expérience, je suis naturopathe, donc quand on me demande certaines plantes je sais orienter les clients.» Malgré tout, la concurrence des petits nouveaux se fait sentir : «Eux, ils achètent pour plus de 150 magasins, nous on ne travaille pas avec une centrale d’achat, on est attaché aux circuits courts.»
Biomonde, coopérative d’indépendants qui aligne 200 magasins, trace son sillon Rue Eugène Eichenberger depuis une dizaine d’années. Mais même avec un réseau national, la concurrence sur les prix est âpre et le conseil ne suffit pas à faire la différence. «Après avoir préféré acheter un article deux ou trois euros moins cher chez Naturalia, une cliente est revenue nous voir pour avoir des conseils d’utilisation!», confie Teddy, vendeur dans le magasin. Des enchères inversées que les clients ne dénient pas. «Si c’est moins cher, oui, je pourrais aller dans un autre magasin», reconnaît une habituée. La démocratisation du bio en marché de masse passe par là. Et dans son baromètre de consommation et de perception des produits biologiques en France publié en janvier 2019, l’Agence Bio note que le principal frein à une plus large consommation de produits bio est le prix, un avis qui recueille 80% des répondants en Ile de France. Problème, pour écraser les prix, il faut être un mammouth, comme le vantait l’hypermarché éponyme aujourd’hui disparu. «C’est la guerre de David contre Goliath!», estime Teddy.
Pour Teddy, Goliath est incarné par les acteurs de la grande distribution, à l’instar de Casino-Monoprix pour Naturalia, des rayons bio des grandes enseignes et des jeunes pousses boostées par un fonds d’investissement comme Bio c’ Bon qui veille sur ses étiquettes comme du lait sur le feu. Entre deux clients, une caissière explique que des relevés de prix sont réalisés dans les magasins bio alentours environ une fois par mois, notamment sur les fruits et légumes qui sont le produit d’appel. Une vigilance encore accentuée par l’installation du Naturalia un an auparavant.
En matière de rayon bio de supermarché, le Leader Price, mitoyen du Biomonde à Puteaux, s’est mis à la page avec de beaux rayons et des slogans «Ici, c’est bio pour le moral» ou encore «Le bio pour tous, au juste prix.» Comme beaucoup d’enseignes, la filiale de Casino a aussi développé un rayon vente en vrac, pour s’adapter aux attentes zéro déchet des consommateurs.
A l’assaut de la grande couronne
Pour l’heure, la conquête du bio se concentre essentiellement dans Paris et sa proche couronne, surtout dans les villes cossues. Mais le concepts se peaufinent pour sortir de la seule cible citadine. Car ce n’est pas parce que l’on habite en grande couronne, parfois près de champs, qu’il y a des fermes bio à tous les ronds-points.
Mi-avril 2019, à Brétigny-sur-Orge, Naturalia a ainsi ouvert son Marché Bio sur 1000 m2. Dans cette ZAC de Maison Neuve, la filiale de Monoprix-Casino n’est pas une pionnière. Elle est venue défier le Biocoop ouvert il y a onze ans et le Coeur de Nature il y a sept ans. A l’intérieur, de larges étals de fruits et légumes protégés de parasols créent l’ambiance, aux côtés d’un rutilant tracteur Farmall Cub rouge des années 1950. De quoi séduire Patricia, qui a foncé sur l’espace vrac. «Ici, nous manquons de producteurs qui viennent avec leurs produits bio. Au marché, ils viennent plutôt de Rungis… Il y a aussi les paniers bio mais il y a un tel engouement qu’il y a une liste d’attente d’un an !»
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